Le 28 août 2024 par Cléa Hameury, Alice Michonnet et Louise Bourget
Paléontologue française, Geneviève Termier est considérée comme l’une des grandes figures de sa discipline au 20e siècle. Le Muséum d’histoire naturelle du Havre lui doit une partie de ses collections dans le domaine des sciences de la terre.
À l’occasion des journées du matrimoine et du projet d’exposition collective « Elles font le musée » porté par l’AGCCPF (Association Nationale des Conservateurs du Patrimoine et des Professionnels des Musées et des autres Patrimoines publics de France), le Muséum du Havre souhaite mettre à l’honneur cette figure scientifique féminine.
Dessinatrice naturaliste
D’abord remarquée pour ses compétences en matière de dessin scientifique, Geneviève Delpey (son nom de jeune fille) se consacre très tôt à l’étude des gastropodes pour lesquels elle propose de nouvelles clés de compréhension et la première classification. Elle obtient brillamment sa thèse en 1939 à La Sorbonne, à une époque où peu de femmes accèdent à ce niveau d’étude, particulièrement dans le domaine scientifique.
« Depuis 1942, mon mari et moi avions décidé de travailler ensemble le plus souvent, au bureau et dans le bled. Naturellement, Henri assumait la stratigraphie et la pétrographie, et moi la paléontologie. Je commençais par me familiariser avec les fossiles paléozoïques du Maroc ainsi qu'avec la pétrographie, consacrant aussi quelque temps à découvrir le beau pays que j'habitais dorénavant, et les coutumes de ses habitants.
Dès que cela fut possible, en 1944, mon mari décida de retourner au Tichka et de m'emmener. Mon rôle serait de prendre des notes et de dessiner montagnes et détails pétrographiques, eu égard à mon "métier de naissance".
Photo : Portrait de Geneviève Termier (DR)
Nous étions chez les Ida-ou-Msattog ; le cheikh habitait alors Lkhoms, village en partie adossé à une faille : le point était bien choisi pour étudier le métamorphisme. Nous partons avec nos guides en suivant l'étroite vallée de l'oued Kma. Celui-ci est en crue. Nous devrons le traverser vingt-quatre fois dans la journée. La plupart des gués sont impraticables, et notre guide Lhassene insiste alors pour me porter sur son dos. Le travail se termine de nuit. Nous repérons au loin la lueur vacillante d'une lanterne qui se dirige vers nous. Le cheikh, voyant la nuit tombée, a craint que nous ne nous égarions, et envoyé un homme nous chercher.
Texte et dessin extraits d’un récit de G. Termier pour les travaux du comité français d’histoire de la géologie (1993).
Dessins scientifiques de Geneviève Termier, documentation de la collection Termier, Muséum d’histoire naturelle du Havre
De la paléontologie à la géologie : une scientifique sur le Mont Richka
En 1942, elle épouse le géologue Henri Termier. Ensemble, ils mènent d’importantes recherches portant sur l’étude stratigraphique du Mont Tichka au Maroc, mais aussi la formation des continents, apport majeur à la compréhension du modèle scientifique de la tectonique des plaques. La contribution personnelle de Geneviève Termier est particulièrement importante sur le plan de l’étude des fossiles : en 1947 et 1950 sont publiés les deux volumes de la Paléontologie marocaine.
À l’occasion de ces travaux dans le massif du Tichka, Geneviève Termier a narré avec humour, dans un article publié en 1993, comment était ressentie la présence d’une femme - scientifique de surcroît - sur le terrain dans les années 1940. Travaux et publications sont toujours signés de leurs deux noms. L’accomplissement commun des Termier demeure une référence dans les domaines de la paléontologie et de la géologie, récompensé en 1985 par le prestigieux prix Albert-Gaudry.
Photo : portrait de Geneviève et Henri Terminer (DR).
Des objets qui intègrent les collections du Muséum du Havre
En 1987, Geneviève Termier fait don au Muséum du Havre d’une part substantielle de la bibliothèque et de la collection du couple de scientifiques, comprenant un ensemble de roches du massif du Tichka, une remarquable collection de fossiles d’Europe, d’Amérique du Nord, d’Afrique du Nord et des restes uniques de plésiosaure de Madagascar.
Décédée en 2005, Geneviève Termier laisse derrière elle un héritage scientifique indéniable, une vie consacrée à la recherche et à la préservation du patrimoine scientifique.
Vertèbres de Plésiosaure de Madagascar, collection Termier, Muséum d’histoire naturelle du Havre (2016.96.177 et 178)
Le travail de recherche biographique sur Geneviève Termier a notamment été mené par Louise Bourget, qu'elle en soit ici chaleureusement remerciée !
Une exposition collaborative
Porté par la section normande de l’AGCCPF, l’exposition « Elles font le musée » permet à près d’une vingtaine d’institutions culturelles, musées et bibliothèques partenaires, de mettre en valeur une femme majeure ou oubliée de ses collections.
Artiste, collectionneuse, mécène, donatrice, conservatrice / directrice, ouvrière, employée, archéologue… leur destin et leur parcours sont divers et méritent d ’être mis en lumière ! Lors des journées du matrimoine 2024, chaque partenaire présentera in situ une ou plusieurs de ces icônes en lien avec son histoire.
Une carte interactive présente et réuni les femmes mises à l'honneur par l’exposition : Elles font le musée !
Une exposition itinérante
Le format de l’exposition a été choisi pour être itinérant. Du 2 septembre au 4 octobre 2025, l’exposition sera présentée dans son ensemble au musée Quesnel-Morinière de Coutances (50). L’AGCCPF a pour vocation de favoriser le travail en réseau des musées de Normandie, de lancer ou de soutenir des opérations collectives, de réfléchir au « maillage » des musées et à leur complémentarité sur le territoire, d’aider à la formation de leurs personnels et à leur adaptation aux nouvelles technologies.
Contact : agccpf-normandie@mailo.com
Vous accueille du mardi au dimanche
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